Échos du plateau Marquette : entre autel et pupitre

Par Audrey Lagacé, technicienne en archives

Le plateau Marquette regroupe trois des plus vieilles institutions religieuses de Sherbrooke. Au centre se trouve la cathédrale Saint-Michel ainsi que l’évêché. Bien qu’ils se soient transformés au cours du temps, leur installation à cet endroit remonte à bien avant la fondation du diocèse en 1874. Les deux autres institutions sont des écoles, d’une part le Mont-Notre-Dame, fondé en 1857 et le Séminaire de Sherbrooke, fondée en 1875. Mais ce sont les bâtiments qui abritaient l’église catholique de Sherbrooke et le prédécesseur du Séminaire qui nous intéressent dans cet article.

Jonction entre les rivières Saint-François et Magog à Sherbrooke, tiré du volume The Eastern Townships A pictural record, planche 13, 98-57-7

La chapelle Saint-Colomban

La première chapelle catholique construite à Sherbrooke, celle de la mission Saint-Colomban, se situait sur le terrain actuel du Séminaire. En 1855, cette dernière devient toutefois trop petite pour la population en croissance et une nouvelle église est érigée et prend le nom de Saint-Michel. Cette dernière est construite sur le terrain actuel de la basilique-cathédrale. C’est-à-dire de l’autre côté de la rue Marquette (rue Market à l’époque). La chapelle Saint-Colomban n’est toutefois pas laissé à l’abandon. Une nouvelle vocation lui est rapidement trouvé : elle servira de bâtiment pour l’Institut Littéraire de Sherbrooke.

Feuille publicitaire pour l’Institut littéraire, trouvé dans le registre Actes et décrets de la paroisse St-Michel de Sherbrooke, 1856, FP1/5.11

L’Institut Littéraire de Sherbrooke

Cette première tentative d’école pour garçon est mené par l’abbé Alfred-Élie Dufresne. Curé de l’église Saint-Michel et missionnaire dans les Cantons-de-l’Est, il assume également la fonction de directeur de l’Institut Littéraire. Il est soutenu dans son rôle par l’évêque de St-Hyacinthe, alors responsable du territoire de Sherbrooke. C’est d’ailleurs ce dernier qui fait la première demande pour l’établissement d’une école d’enseignement supérieur. L’entente était que l’abbé Dufresne devait s’entendre avec les citoyens de Sherbrooke pour produire une pétition et faire une demande officielle à la législature pour obtenir la reconnaissance civile[1] en échange de quoi Mgr Prince donnerait le terrain et la chapelle Saint-Colomban à l’Institut.

Pour sa première année, les critères d’admission de l’Institut Littéraire étaient particulièrement peu exigeants pour une institution d’enseignement supérieur[2]. Le seul critère de sélection des étudiants est qu’ils doivent savoir lire et écrire. De plus, il n’y a pas de distinction faite entre les anglophones et les francophones ou même entre les catholiques et les protestants. L’établissement engage alors un seul enseignant, un étudiant en théologie se préparant au sacerdoce venu de Saint-Hyacinthe. La première cohorte est composée de 54 élèves et parmi ceux-ci 18 ont reçu leur instruction gratuitement.

Registre comptable du Collège industriel de Sherbrooke, 1862-1863, A13,SD1/2

Le Collège industriel

En mai 1857, soit deux ans après la fondation de l’Institut, le nom change officiellement pour devenir le Collège de Sherbrooke, communément connu sous le nom de collège industriel. Le 29 août de la même année, un incendie détruit l’ancienne chapelle. Mgr Prince décide toutefois de reconstruire le bâtiment immédiatement. La nouvelle construction en brique de deux étages mesure 50 pieds par 30 pieds et a coûté 1200$.

Entre 1855 et 1863, l’institution connait de grande difficulté à plusieurs niveaux. Au niveau financier, la contribution gouvernementale est faible et ne permet pas de couvrir tous les frais encourus et le remboursement des dettes. De plus, la rétention des enseignants semble difficile, puisqu’ils changent pratiquement à tous les ans. L’abbé Dufresne, qui a été directeur de nombreuses années, ne peut pas assurer une présence constante dans la gestion de l’établissement puisqu’il se déplace fréquemment pour assurer son rôle de missionnaire. Il y a même été question de placer l’institution sous la tutelle du Séminaire de Saint-Hyacinthe. Ce dernier refuse cependant à deux reprises de prendre cette charge à la demande de l’évêque. Finalement, un essai d’un an sera effectué, mais le Séminaire de Saint-Hyacinthe ne reconduit pas la chose l’année suivante, décidant avant même la fin de l’année scolaire qu’il ne reprendra pas la charge du Collège de Sherbrooke[3].

L’école-modèle

Finalement, en 1863, le Collège de Sherbrooke n’est plus une institution d’enseignement supérieur, il devient une école-modèle. L’enseignement dispensée touche les matières scolaires principales : le français, l’anglais, l’arithmétique, la géographie, l’histoire et la tenue de livres. L’enseignement est aussi donné par un laïque plutôt que les étudiants en théologie.  

Séminaire Saint-Charles-Borromée en 1875, le rectangle rouge représente le bâtiment de l’école-modèle après les rénovations de 1875, SPD355.001

Le Séminaire Saint-Charles-Borromée

Lors de l’arrivée de Mgr Antoine Racine en octobre 1874, ce dernier affirme rapidement sa volonté de fonder un séminaire diocésain. Ce séminaire, connu alors sous le nom de Saint-Charles-Borromée, ouvre ses portes aux étudiants en 1875 dans le bâtiment qui abritait l’école-modèle. Ce bâtiment a subi des modifications importantes durant l’année précédente, mais il est alors toujours possible de voir le bâtiment d’origine.  


Références

[1] Le collège industriel de Sherbrooke 1855-1875, travail présenté par Michel Ayotte dans le cadre du cours d’Histoire des Cantons de l’Est, suivi à l’Université de Sherbrooke, 1974, P1075/1.2.

[2] Le collège industriel de Sherbrooke 1855-1875, travail présenté par Michel Ayotte dans le cadre du cours d’Histoire des Cantons de l’Est, suivi à l’Université de Sherbrooke, 1974, P1075/1.2.

[3] Le collège industriel de Sherbrooke 1855-1875, travail présenté par Michel Ayotte dans le cadre du cours d’Histoire des Cantons de l’Est, suivi à l’Université de Sherbrooke, 1974, P1075/1.2.